Part 9

Plus tard, Kelvian revint et commença à peigner les cheveux soyeux de sa sœur après son ordre… sa demande. Il leur semblait qu’ils étaient remontés quelques années dans le passé, à l’époque où les affaires familiales étaient le cadet de leurs soucis.

-          J’ai l’impression de rajeunir pas toi, Kelvian ?

-          J’ai l’impression de régress… bwarg, oui, je suis tout à fait d’accord avec toi, grande sœur Katy, dit-il alors dans la douleur.

-          En tout cas, merci de céder à tous mes caprices, je me sens revigorée pour quelques mois là, ha, ha, ha !!

-          Ah tu savais que c’était des caprices ? Heu non, non rien, fit donc ce dernier craintif.

-          Hum. Quoiqu'il en soit, depuis la dernière fois que l’on s’est vu, je vois le trouble à travers toi.

-           !!? Kelvian était surpris par cette remarque.

-          Je ne sais pas ce qui te préoccupe, si tu ne m’en parles pas, ça doit être pour une raison particulière, mais  ne t’inquiètes pas, quoi qu’il advienne je te soutiendrai toujours, fit-elle alors en se retournant face à Kelvian, le regardant pleine d’amour, plus qu’un amour fraternel, comme l’amour qu’a une mère pour son enfant.

-          Katy… Je suis à ce point troublé ?

-          Si tu ne t’en rends pas compte c’est que tu n’as pas encore trouvé les tenants et les aboutissants de ce qui te ronge. Quand tu sauras de quoi il s’agit, fait ce qui te semble juste.

-          … Katy… dis moi.

-          Oui ?

-          Selon toi c’est mieux de vivre selon ses propres règles ? Dit Kelvian confus.

-          Que recherches-tu ? La liberté ? Tu penses être entravé par quelque chose ? Par ce nom que tu portes ?

-          Non, ça n’est pas ça… Comment dire… ? Parfois on est amené à faire certains choix.

-          Nos vies résultent d’un enchainement de choix. Que ça soit nos propres choix ou des choix d’autrui, rétorqua alors Katy en une traite.

-          Mais un homme, un vrai, une fois qu’il est décidé, quand il fait un choix, il ne revient jamais sur sa parole, pas vrai ? Il l’assume jusqu’au bout pas vrai ?

-          Où veux-tu en venir ? Fit donc Katy d'un air perplexe.

-          Mais, comment dire… Si  au moment où il fait son choix, il est persuadé qu’il a raison et que par la suite tout s’effondre autour de lui, est-ce qu’il devrait considérer ce choix comme étant le meilleur des choix ?

-          Tout dépend de la volonté de cet homme. S’il est résolu à tout perdre sans ne jamais rien regretter, il peut se lancer sans se poser de questions. Mais tout choix implique des conséquences, totalement les ignorer résulte soit d’une volonté inébranlable soit de la folie, répondit-elle alors sèchement.

-           !!

-          Il y a toujours une raison particulière qui pousse à faire un choix. Ce n’est même pas le choix qu’il faut analyser, mais les raisons de ce choix. Les choix liés aux sentiments comme l’amour, ou la haine sont à double tranchant car ils ne dépendent pas seulement de celui qui fait le choix. Sans cohésion  ce genre de choix ne mène qu’à la destruction. Les choix liés aux croyances voient leur effet varier en fonction de la foi qu’a le sujet. Si je devais donner un conseil sur une question de motif de choix, il faudrait prendre quelque chose de stable, de pérenne. L’argent fait un excellent motif. L’argent n’a pas d’odeur, n’a pas de valeur sans se comparer aux autres qui  nous entourent, donc on est obligé de les prendre en considérations, dans un univers perfide et méfiant. L’argent en fonction de ces mêmes données extérieures peut devenir une faiblesse, une arme néfaste envers son possesseur. Enfin pour les personnes raisonnées. Qu’est-ce que j’entends par là ? Un exemple concret : tu as de l’argent, tu es dans un milieu hostile par exemple un quartier chaud, entre ces deux choix que choisirais-tu ? Te promener avec les sous dans ta main, ou te promener avec les sous dans ta poche ? Si tu es motivé par l’argent tu voudra garder ton argent et donc tu ruseras en fonction des éléments qui t’entourent, tu vois ou je veux en venir ?

-          Tu fais des phrases trop compliquées là...

-          En gros si tu n’es pas sûr des conséquences de ton choix, si tu sais que tu pourrais perdre des choses, qu’il y a des chances que tu le regrettes par la suite et surtout que tu n’es pas sûr de les assumer, n’y pense même pas. Voilà ce que je disais en gros.

-          Tu ? Moi ? Heu je parlais en général… dis donc Kelvian surpris par cette remarque qui semblait lui être directement adressée.

-          Moi aussi !! C’est plus facile de faire passer le message de cette façon, tu vois ce que je veux dire? Dit Katy en faisant des mouvements avec ses mains comme pour expliquer à un enfant son raisonnement.

-          Ah… Et si on a le choix de ne pas choisir ?

-          Le choix de ne pas choisir reste toujours un choix. Tu veux dire hésiter, hésiter et laisser le temps faire son travail ? Cela s’apparenterait plus à une forme de lâcheté. C’est comme se voiler la face à soi même, ne pas vouloir choisir c’est chercher une autre solution, si elle existe tant mieux, sinon ce n’est qu’une perte de temps. La plupart du temps dans ce genre de cas de figure, on obtient ce qu’on ne voulait obtenir et on perd ce qu’on ne voulait perdre. Selon moi c’est le pire des cas. Mais la lâcheté n’est pas à défaut un mauvais côté, elle a certaines vertus également.

-          Je … je vais y réfléchir, merci Katy.

-          De rien !! J’espère que mon raisonnement t’a aidé. N’oublie pas que ce raisonnement est le mien et donc n’est pas objectif par défaut, j’essaie de l’être mais tu ressens bien mes idéaux.

-          On n’a que 5 ans de différence mais tu es vraiment plus mature que moi… À 12ans on la ressent bien, mais à 30ans je suis sensé être un homme mûr…

-          Parfois il y a des réponses qu’on ne trouve pas par nous même et ce, quels que soient les âges. Avant de te poser ce genre de questions, attardes toi sur ce qui te trouble et essaie de trier le vrai du faux, le faux du vrai, de rechercher la vérité dans le mensonge, la réalité dans l’illusion.

-          Roh t’es philosophe ou quoi ? Fit-il ainsi embarrassé.

-          Réfléchis à tout ça, à tête reposée, ce soir tu es agité. Allez, c’est l’heure d’aller se coucher.

-          Oui. 

Un peu plus tard :

-          Il est vrai que pour le commun des mortels tu es un être parfait, Kelvian…

-          Quoi ? Toi aussi tu me contes ces inepties ?

-          Pour moi tu es ce que je ne pourrais jamais être, tu es tout ce qui me manque, je me repose tout le temps sur toi, et même si je te dis de faire de même, ne le faisant jamais, j’avais moi aussi commencé à nourrir cette idée de la perfection que tu incarnes, lui dit-elle en lui caressant les cheveux.

-          Vraiment…

-          Te voir aussi troublé m’a ramené à la réalité.

-          Comment ça ? Dis alors Kelvian incompris.

-          C’est moi l’aînée, et toi le cadet, pas le contraire. Je me suis toujours appuyée sur toi comme je l’aurais fait sur un grand frère.

-          Katy…

-          J’ai été très égoïste au cimetière aussi, désolée…

-          Non, t’inquiètes, c’est juste que j’ai inquiété tout le monde bêtement, c’est moi qui dois m’excuser…

-          Ne garde pas tout pour toi Kelvian, si tu ne trouves pas comment les évacuer, tu n’imploseras pas ne t’inquiètes pas, le corps humain n’est pas fait pour ça...

-          Comment ça ?

-          Ça sortira tout seul, que tu t’en rendes compte ou pas, fit donc Katy sur un air monotone quasi fataliste.

-          Ce n’est pas positif alors… ?

-          Tout dépend de ta vision de ce qui est positif ou pas, nous vivons dans un monde tordu. Je suis aussi tordue que mes congénères, je sais que j’ai cessé d’aimer ce que je devrais et que désormais j’aime ce que je ne devrais pas… Mais c’est mon choix ha, ha, ha !!

-          Tu parles de ton dévouement pour ton travail là ?

-          Peut être bien que oui, peut être bien que non hé, hé, dit-elle alors sur un air enjoué.

-          Arf tu es plus forte que moi pour faire tourner les gens en bourrique.

-          En tout cas, nul besoin de te presser, Kelvian.

-          Pardon ?

-          Tu es mon petit frère, le moment où tu devras faire ton choix, tu sauras choisir ce qui est bon pour ce que tu considères en valoir la peine.

Ils restèrent un moment silencieux quand Kelvian reprit :

-          Mais ce n’est pas de moi que je parlais pour cette histoire de choix !!

-          Mais oui mais oui, t’inquiètes c’est juste une expression pour bien faire passer le message, fit-elle alors en lui caressant les cheveux.

-          Katy… désolé !! Fit-il en posant sa tête contre la poitrine de Katy.

-          Et ben ? Bah je te dois bien ça, j’ai fait pareil en début de soirée.

-          Je ne vois pas de quoi tu parles, fit-il alors en étouffant quelques sanglots, je suis désolé… fit-il alors en s’accrochant à elle.

Ils s’endormirent ainsi. Katy avait fait tomber l’un des masques de Kelvian.

Kelvian marchait dans une ruelle relativement sombre, l’esprit complètement ailleurs quand il entendit la voix d’Hélène, il en sursauta et releva la tête tombant nez à nez avec celle-ci.

-          Hélène !!! Mais où étais-tu passée bon sang ??

-          Ça ne te concerne pas, fit donc Hélène sur un ton presque méprisant.

-          Quoi ? Bah je ne veux pas t’étouffer mais je me suis inquiété quoi ? Fit donc Kelvian bien plus que surpris par la réplique de sa fiancée.

-          Vraiment ? Ça t’arrive de t’inquiéter pour moi ? Commença-t-elle furieuse.

-          Comment ça ? Dit Kelvian plus incompris que jamais.

-          Ces derniers temps tu ne pensais pas qu’à une chose ?

-          Pardon ?

-          Lui !! Fit-elle alors en pointant dans la direction opposée.

Kelvian se retourna donc incompris.

-          Mais de quoi tu…

-          Kelvian, je ne peux plus continuer comme ça, faisait donc Nicolas qui s'avançait vers eux à moitié nu.

-          Quoi ? Mais qu’est-ce que tu fais là Nico ? Et on est où là ? Je ne sais même plus pourquoi j’allais par là…

-          Ce n’est plus à toi de poser les questions Kelvian, je suis à bout là !! Kelvian !! Hurla donc Hélène.

-          Mais quoi ? Quoi ? Qu’est-ce qui te prend Hélène ? Je ne te reconnais plus, tu sais ?

-          Vraiment ? Pourtant après tout ce temps passé  ensemble tu devrais me connaître un minimum, non ? Tu n’as jamais vu que j’étais comme ça ? M’as-tu ne serait-ce qu’une seule fois regardée ??

-          Mais bien sûr enfin, qu’est-ce que tu racontes ?? Je suis le seul à ne plus rien comprendre ici ?? Fit-il alors les mains pointant vers le ciel tout en secouant la tête.

-          Kelvian tu n’as toujours pas compris ? Lui fit-elle donc d'un regard haineux.

-          Mais compris quoi ? Mais qu’est-ce que tu fais Nico ? Rhabille-toi !! Tu as perdu l’esprit ? Avait-il dit en se retournant vers ce dernier.

-          Mais… les endroits où tu m’as touché me brûlent, ils brûlent de passion !!

-          Ouh là, ouh là. Depuis quand tu divagues comme ça, Nico ? T’as toujours pas dessaoulé ? Baragouina Kelvian estomaqué.

-          Kelvian !! (Hélène)

-          Oui ?? Fit donc Kelvian perdu en se retournant vers elle.

-          Qu’est-ce que ça veut dire ? (Hélène)

-          Mais quoi ?! (Kelvian)

-          Tu l’as touché ?? Tu me trompes avec des mecs maintenant ? Non pardon, pas n’importe lequel, celui pour lequel je t’ai toujours mis en garde !!

-          Heu, ce n’est pas ce que tu crois !! Nico tu fous quoi merde !!! Fit-il donc en secouant la tête au début puis en se retournant vers un Nicolas qu'il n'avait jamais connu auparavant.

-          Je voulais te demander de choisir mais je crois que là ma coupe est pleine. (Hélène)

-          Quoi ?! Dit Kelvian en se retournant une nouvelle fois vers Hélène presque comme s'il allait se briser le cou.

-          Oui choisis-moi Kelvian !!! J’ai toujours rêvé de t’appartenir !! Faisait Nicolas tout en se dandinant dans tous les sens, comme en transe.

-          Bordel Nico ta gueule !! Mais qu’est-ce qui te prend à toi aussi putain !! Kelvian commençait à s'énerver car la situation lui échappait complètement.

-          Oh que tu es méchant, comment tu me parles d’abord !! Répondit alors Nicolas avec une mine boudeuse.

-          Hélène je ne l’ai touché qu’une seule fois !! J’étais bourré !!! Tenta-t-il de dire afin de convaincre une Hélène totalement hors d'elle.

-          Et en Laponie ?? Tu ne sais plus compter ??

-          Quoi ? Mais comment  tu sais ?? Fit donc ce dernier abasourdi.

-          Ha !!  J’avais raison, Kelvian tu es dégueulasse !! Tu es la honte de ta famille !!!

-          Quoi ??! (Kelvian)

-          Kelvian choisis moi !! (Nicolas toujours se dandinant)

-          J’annule les fiançailles je ne veux plus entendre parler de toi Kelvian ! (Hélène toujours hors d'elle)

-          Non !! Mais attends !! (Kelvian encore plus incompris que jamais)

-          Attendre  quoi ? Que tu me piétines encore plus ? Je n’ai pas suffisamment enduré d’après toi !!?

-          Et ta gueule la pouffe !! Je le connais depuis bien plus longtemps que toi, c’est toi qui t’es immiscée dans nos vie alors tu peux mettre les voiles ! Dit donc Nicolas qui s'énerva à son tour.

-          Hey…vous deux…murmura alors Kelvian en plein désarroi.

-          Nicolas, même avant de me rendre compte que tu avais des sentiments pour lui je ne t’aimais déjà pas, alors ne m’adresses pas la parole je te prie.

-          Ah ouais ? Et mon poing dans ta gueule ?

-          Hey… Hélène… Nico…

-          Bah vas-y je n’attends que ça !! Je  te clouerai au trou pour 3 ans au moins !!

-          Mais putain de  merde vos  gueuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuules !!!

-          Qu’est-ce qui te prend ? Firent donc Hélène et Nicolas en coeur.

-          S’il vous plaît laissez moi réfléchir un instant… dit alors Kelvian qui essayait de remettre de l'ordre dans ses idées, des sueurs froides parcouraient toutes les parties de son corps.

-          Réfléchir à quoi ? Tu es fini Kelvian,rétorqua donc Hélène, tu n’avais pas encore remarqué ? Tu n’a même plus de nom !! Ha, ha, ha, ha, ha !! Ton père t’a renié pour ce que tu m’as fait !! Pour ce que tu as fait à l’emblème de ta famille !! Vas donc finir le reste de tes jours avec ce mécréant, au final il aura sucé ton sang jusqu’à la moelle !!

-          C’est pas vrai ? J’étais pas encore prêt… J’avais pas encore fait mon choix…

-          Quel choix ? Fit une nouvelle voix.

-          Hein ? Fit alors Kelvian en relevant la tête, Katy ?

-          Tu as trop pris ton temps, le destin s’acharne désormais contre toi. Tu n’es même plus un Kinine, tu fais vraiment pitié !!

-          Quoi ???

-          Les Kinine sont grands, les Kinine sont tout ce que tu aurais dû avoir à l’esprit !! Tu t’es laissé avoir par ces sentiments néfastes, je t’avais prévenu !! Tu n’es même plus mon frère  ha, ha, ha, ha, ha, ha !!!!

-          Non, par pitié,  stop… commença Kelvian en larmes.

-          Moi !! Viens à moi Kelvian  je ferai tout pour toi !!

-          Stop, s’il vous plaît…

-          Disparaîs de ma vue pauvre cloporte, tu n’as que ce que tu mérites !! Dis Katy d'un ton sadique à l'extrême.

-          Arrêteeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeez !!!! 

C'est donc les larmes aux yeux que Kelvian se réveilla de son cauchemar. En sueur et essoufflé. Quand il se rendit compte qu’il s’agissait d’un rêve il se calma doucement, sans bouger, toujours accroché à Katy. « Un corps de femme ? » pensait-il  « Je suis où déjà » fit-il en sortant de sous la couette. Il scruta la chambre sombre du regard, et se rappelait qu’il était dans la chambre de sa sœur. Il ne s’était pas beaucoup reposé durant ce week-end. Beaucoup de choses lui avaient traversé l’esprit également. Après un tel rêve il se sentait comme vidé de toutes ses forces, se rappelant de la puissance des sentiments de chacun, du poids de vérité de chacun, il se remit à sangloter. Il s’arrêta quand Katy bougea, changeant de position. « Katy, jusqu’où puis-je te croire ? Tu avais l’air tellement cruelle dans ce cauchemar… » Pensait-il en regardant la silhouette endormie. La lumière des jardins pénétrait faiblement dans la chambre. On pouvait y déceler des formes et des profondeurs. Comme un enfant effrayé Kelvian se rapprocha du visage de Katy pour être sûr qu’il s’agissait bien d’elle. Puis un instant il pensa :

« Qui est cette personne couchée dans le même lit que moi ? Sous la même couette que moi ? » Il alluma donc la lampe de chevet car il ne la reconnaissait pas. « C’est personne c’est bien Katy ? » pensait-il toujours ? Ce qui le marquait, c’était ce visage paisible qu’avait Katy. Il eut semblé qu’elle n’arborait jamais une telle expression étant consciente. Il ne pouvait croire qu’il s’agissait bien de Katy, il fut complètement hypnotisé. « Que fait cette sublime jeune femme dans mon lit ? »Pensa-t-il alors. Il élança donc son bras pour effleurer le visage de cette dernière quand Katy changea d’expression, devenue alors beaucoup plus froide. « Ah ! Là c’est Katy, si je la réveille elle me tue, retournons nous coucher» C’est sur un comportement plus serin que Kelvian retourna se coucher et s’endormit.